


Le Soutien, en amont, pendant et en aval de la maladie
Recevoir un diagnostic de cancer est souvent bouleversant. L’annonce de la maladie vient briser l’équilibre de vie de la personne atteinte, comme celle de ses proches.
L’annonce du diagnostic : les personnes atteintes d’un cancer sont amenées à vivre un grand stress face à la maladie et à son impact. Les questions se bousculent, ce sentiment étant parfois exacerbé par le recours au jargon technique des soignants primo-annonciateurs (typiquement les radiologues…). : Quels effets auront les traitements sur moi ? Vais-je guérir ? Quel est le pourcentage de guérison ? Pourquoi suis-je frappé(e), moi, par cette maladie ?
Lorsqu’on vous annonce que vous avez un cancer, il est normal, pour vous comme pour votre entourage, d’avoir une ou plusieurs réactions bien identifiées : vivre un « choc », ne pas croire au diagnostic, particulièrement lorsqu’il n’y a pas de symptôme, être en colère, trouver la situation injuste, n’avoir aucune (ou peu de) réaction émotionnelle, ce que l’on peut traduire parfois comme un excès de rationalisation, une mise à distance ou ce que les professionnels de la santé psychique désignent comme une « sorte d’émoussement émotionnel ». (Cf. : Courbe du deuil, d’Elizabeth Kübler-Ross).
A cela s’ajoutent parfois les pensées suivantes chez les personnes atteintes d’un cancer : perte de contrôle de leur vie, peur que leur corps et leur image d’elles-mêmes changent, sentiment d’impuissance quoi qu’elles fassent, tristesse, culpabilité, inquiétude pour leur travail / leur carrière, pour leur couple et leurs enfants, etc.
Ces réactions révèlent typiquement ce qui est vécu de l’intérieur. Prêtez-y le maximum d’attention. Elles indiquent que vous devez prendre soin de vous, bien vous entourer et vous créer un autre équilibre de vie.
Comment la nécessité de consulter peut émerger : chaque personne vit différemment avec
la maladie et les soins. Cependant, celle-ci peut se manifester par des signes physiques (qui ne sont pas liés à la maladie ou aux traitements), comme un mal de ventre ou de tête, la perte d’appétit, de l’insomnie, des tensions musculaires, de la fatigue, du mal à se concentrer, etc. En outre, des comportements inhabituels apparaissent : perte d’intérêt pour les activités que l’on appréciait auparavant, se montrer irritable et agressif, développer des comportements d’évitement envers sa famille et les proches.
Dans la majorité des services hospitaliers, des psychologues sont à votre disposition pour vous aider, individuellement ou au sein de “collectifs de paroles”. Ils peuvent aussi recevoir vos proches si vous le souhaitez afin de leur permettre d’être mieux présents à vos côtés dans la lutte contre la maladie.
Aujourd’hui la douleur est également prise en compte. Ainsi les consultations anti-douleurs se sont développées depuis une dizaine d’années, et vous trouverez dans quasiment l’ensemble des centres hospitaliers des équipes solidement formées sur la question.
Un soutien pendant la maladie
La lutte contre le cancer est un combat souvent long et difficile. Aussi, de nouveau, n’hésitez pas à consulter les soignants ressources en matière de santé psychique, psychiatres comme psychologues, à n’importe quelle étape de vos traitements et de votre suivi.
Ces ressources font partie intégrante de votre équipe de soins.
Un soutien après la guérison ?
C’est à chacune, individuellement et en conscience, de répondre à cette question en fonction de la manière dont elle se sent.
Toutefois, il est évident qu’une fois la guérison acquise, la crainte et l’ombre de la rechute restent prégnantes. En outre, la fin des traitements, que certaines vivent comme une forme « d’isolement » – due à la décentration au regard de la fin de la maladie – peut générer des affects dépressifs à ne pas négliger. Dans sa forme la plus sévère, cela pourra engendrer une dépression chez la femme. L’entourage lui-même peut également avoir besoin d’un soutien psychologique. Comme toujours, n’hésitez pas à en parler à un médecin.
Vous pouvez vous faire aider pour mieux vivre la période après-cancer et prendre des décisions importantes, comme celle de vous faire reconstruire un sein si vous avez subi une mastectomie, ou faire évoluer votre vie, qui a été perturbée par la maladie et son traitement. De manière fréquente, voire systématique, il est fréquemment constaté que les personnes ayant connu une guérison d’un cancer développent des attitudes propices à prendre soin de leur corps, dans sa globalité : alimentation, activités sportives, travail sur les notions de conscientisation, de mentalisation et de gestion plus sereine des registres émotionnels comme intellectuels.
L'estime de soi après toutes ces épreuves
Selon Albert EINSTEIN, « L’estime de soi est l’estimation de la distance entre ce que tu crois être et ce que tu es ».
L’estime de soi, dans sa dimension sociale dans nos relations aux autres, est entièrement intriquée avec la notion de l’affirmation de soi, à tout le moins si cette notion de confiance était présente avant que la maladie ne vienne indéniablement l’ébranler…
Pour aller plus loin encore sur une notion voisine, le narcissisme, un célèbre psychiatre français a défini le concept de « violence fondamentale », comme étant l’expression la plus primaire du narcissisme, ou encore la manifestation ultime, inconsciente majoritairement, de l’instinct de survie d’un individu.
Dans cette maladie terrible qu’est le cancer, c’est notre corps qui vient témoigner d’un dysfonctionnement, voire d’une défectuosité insidieuse, cependant que l’on avait le sentiment d’être une personne lambda, avec un narcissisme standard et une estime de soi correcte et élaborée.
Une fois le diagnostic posé, puis le traitement en cours, l’écart entre l’image de ce corps, déjà dysfonctionnel, de surcroît abîmé, fatigué, meurtri par la médication, l’ablation d’une partie de soi, cet écart donc avec celui d’un corps que l’on fantasme après la guérison est pour une femme atteinte du cancer foncièrement abyssal ! Cependant, c’est bien ce fameux instinct de survie primaire, archaïque, qui nous amène à accepter quelque chose de fondamentalement contre-intuitif : ne pas détester notre corps qui fait défaut, et surtout accepter de l’empoisonner pour lui permettre de se diriger vers la guérison. Viennent se mêler à tout cela, qui déjà représente une charge mentale et émotionnelle folle, le regard de l’Autre, notre propre regard, nos représentations de nous-mêmes, tantôt dévastées, tantôt positivistes pour l’on ne sait quelle raison, l’hyper-technicité derrière laquelle certains soignants se réfugient pudiquement ou avec trop de certitudes, l’attitude des proches, qui n’ont pas toujours eux-mêmes un rapport confortable avec l’idée de maladie (en même temps, qui l’aurait automatiquement ?).
En effet, pour quelqu’un qui n’a pas éprouvé le caractère dysfonctionnel de son corps, il paraît impensable que tant de heurts (chimiothérapies, radiothérapie, reconstruction etc.) puissent nous affecter à un point tel que nous nous détestions parfois au plus profond de nous-mêmes. On peut ajouter encore la distance s’installant avec certains de nos amis, etc. On pourrait presque en faire un inventaire à la Prévert des dégâts que provoque cette monstruosité qu’est le cancer, celui du sein en étant un représentant notoire.
A cette étape, on l’a bien compris, il faut enclencher aussi vite que possible notre passage dans la lessiveuse émotionnelle, morale et intellectuelle qu’est la courbe du Deuil… Ah cette satanée succession de Déni, Colère, Peur, Marchandage, Négociation (avec qui d’ailleurs, Nous ? Dieu ? les équipes de R&D sur le Cancer ?, non mais c’est vrai !), Dépression – un peu, beaucoup, à la folie –, Acceptation, Découverte de son nouveau Soi, puis une fois la guérison acquise, Agir et (re)vivre, se (re)découvrir, etc.
C’est exactement là que le paradoxe ultime de la restauration de l’estime de soi après un cancer réside :

